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Le 19e siècle est communément appelé le “siècle de la bourgeoisie”. C’est alors la classe sociale dominante. Elle s’enrichit grâce à la révolution industrielle, construit des fortunes et éclipse la noblesse, bien souvent ruinée.
Et elle veut se distinguer de cette noblesse oisive d’ancien Régime qu’elle juge frivole et désinvolte.
Le vêtement subit alors progressivement un changement : on voit peu à peu disparaître les tissus chatoyants et précieux, -héritage de l’Ancien Régime- qui laissent place au drap; les teintes sombres et unies relayent les couleurs vives et bariolées. C’est le triomphe du noir, de la raideur, de l’austérité et de l’ascétisme de la tenue masculine. Le vêtement masculin civil se singularise par une sobriété et un dépouillement qui symbolisent un nouvel ordre économique et politique, c’est l’expression vestimentaire d’une nouvelle légitimité sociale.*
Bien sûr, cette mode s’étend à tous, et les artistes, critiques d’art et intellectuels représentés par Henri Fantin-Latour dans ses tableaux -l’atelier aux Batignolles (1870), le Coin de table (1872) ou l’Hommage à Delacroix (1864) entre autres- sont eux-mêmes habillés de noir.
A la même période, une autre révolution transforme la société bourgeoise : l’hygiène. "La propreté est un produit économique et culturel réservé à une élite car elle constitue un indice de classe : chacun sait que la bourgeoisie se salit moins par rapport à la classe ouvrière ou au monde paysan. Avoir du linge, porter des plastrons, des cols, des cravates ou des manchettes au blanc immaculé sont les marques d’un train de vie luxueux.*
Sur ces habits noirs, donc, la seule tache de lumière est alors le col blanc, souvent raide, graphique, assorti le plus souvent d’une cravate noire en journée.
Pour ce qui est des femmes peintes par Henri Fantin-Latour, elles sont discrètes, récusent la mode qui transforme la femme de cette époque en bel oiseau inaccessible, faire-valoir de l'homme, et transcrivent une forme de pudeur, presque de pudibonderie qui se développe au 19e siècle et que la société exige aussi de la femme de la bourgeoisie, cette femme qui ne doit être qu’épouse et mère.
La céramiste Anne Berthelot a interprété ce col blanc en porcelaine, lui donnant une forme plus large, et en lui imprimant parfois ces motifs de dentelle que l’on retrouve sur les bords discrets de quelques uns de ces cols, féminins cette fois.
Quand à la fondatrice de l’atelier My Dear Claude, elle s’est penchée sur une version tissu intemporelle, que le siècle suivant baptisa « col Claudine » en référence au roman de Colette, mais que l’on retrouve entre autres, sagement porté par Nathalie et Marie, les deux sœurs de Henri Fantin-Latour dans son tableau Les Brodeuses (1850).
De haut en bas : détails des tableaux de Henri Fantin-Latour (Musée d'Orsay) l’Hommage à Delacroix (1864), le Coin de table (1872), La famille Dubourg (1878). Col de porcelaine Anne Berthelot, Col de tissu : My Dear Claude, Les deux soeurs ou les brodeuses (1850).
* source : Le code vestimentaire de la bourgeoisie au temps de Flaubert et de Maupassant
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Vous pouvez bien sûr retrouver ces pièces dans l’exposition en ligne "Après Fantin-Latour", qui présente des œuvres d'art, des pièces d'artisans-créateurs et de petites entreprises inspirés par l'univers du peintre.
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